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LES ANNEES 50
Difficile renaissance de la vie gay.
Après
la Libération, les messins retrouvent le goût de vivre, de faire
la fête et de danser, autant de plaisirs qui avaient été interdits
durant l'annexion. Avec la forte présence des Américains à Metz, la
ville voit se multiplier de nombreuses salles de bal, des dancings, des
bars, des brasseries, des guinguettes. Le jazz côtoie la musette.
Toutes les couches de la population y trouvent leur compte : La
bourgeoisie fréquente les bals de société de l'Hôtel des Mines ou le
dancing Le Cristal, les militaires américains se retrouvent à
l'Excelsior qui programme du jazz, mais aussi au petit bar Le Scotch,
les employés et les ouvriers vont dans les bals musette comme le
Bibilolo, la Java, Le tout va Bien, ou dans les guinguettes comme Le
Chat, Chez Hein, le Bel Air, les femmes de ménage rencontrent les
bidasses à la Cigogne, et tout le monde se croise au Trianon, au
Kursaal, au Café de la République, aux Ambassadeurs ou au Windsor qui
est ouvert 7 jours sur 7. Pourtant les gays messins, encore traumatisés
par l'annexion allemande, ne bénéficient d'aucun lieu de rencontre et
sont condamnés à retourner à leurs vieilles pissotières s'ils veulent
rencontrer leurs semblables. Les "tasses" les plus célèbres de cette
époque sont, comme avant-guerre, celles de la Place de la Comédie, de
Bon Secours et de la Porte Serpenoise. Une autre vespasienne connaît
aussi un certain succès, près du parvis de la cathédrale à coté du
marché couvert. La fermeture des bordels, décidée récemment, pousse
d'ailleurs un grand nombre de bons pères de familles à fréquenter les
vespasiennes et à connaître de nouveaux plaisirs, moins tarifés mais
plus alternatifs. Les nombreux soldats français, canadiens et
américains alimentent aussi les tasses messines en jeunesse vigoureuse.
Tasse
Quant aux dancings, inutile d'y songer
pour draguer... ce plaisir est
réservé uniquement à la drague hétérosexuelle. On est encore loin du
concubinage gay, mais les homosexuels ont le droit de se marier ...
avec des personnes du sexe opposé. Ce droit est d'ailleurs presque une
obligation sociale si on ne veut pas vivre en marginal. Peu de gays se
risquent à ne pas suivre la norme, dans notre région plus qu'ailleurs,
d'où ce sentiment totalement faux qu'il n'y a pas d'homosexuels à Metz
dans les années 50. La répression sanglante de la dernière guerre a
modifié leur comportement mais pas leur nombre, puisque chaque nouvelle
génération voit naître un pourcentage à peu près identique
d'homosexuels, depuis que l'homme est sur terre. Les nazis l'avaient
d'ailleurs bien compris, puisqu'ils n'ont jamais parlé de solution
finale pour les gays, sachant parfaitement que le problème se poserait
à chaque génération dans les mêmes proportions.
Parcours des vespasiennes dans les années 50, 60, 70 dans le centre de
Metz.
A cette époque, l'Ile du Saulcy n'est pas encore devenue le centre de
la drague homo. La porte Serpenoise ne sera plus visitée à partir des
années 70 et Bon-Secours (sur le terreplein central de la rue de
Verdun) va devenir le point le plus chaud de la ville. Les travestis et
prostitués vont aussi se localiser sur la rue de Verdun, en marge de la
prostitution "classique" des filles rue Pasteur et rue Lafayette. Ce
n'est que dans les années 80 que les tasses vont disparaître peu à peu
et que la drague homo va se déplacer au Saulcy, sur les berges de la
Moselle et de la Seille. Les prostitués travestis émigreront alors du
coté de l'Avenue Jean XXIII.
A
Nancy, si le traumatisme de la guerre a moins de conséquence sur les
homosexuels nancéiens que sur leurs homologues messins, leur vie n'en
est pas moins difficile. La société française a connu un recul de deux
décennies concernant l'acceptation de l'homosexualité. Beaucoup d'homos
de province choisissent de partir à Paris où la vie est un peu plus
facile pour eux, en raison essentiellement de l'anonymat que la grande
ville propose.
Ici, comme ailleurs, les vespasiennes et les parcs sont les seuls lieux
de rencontre. La tasse du Cours Léopold, celle du marché, le Parc de la
Pépinière et le Parc Saint Marie ont leurs adeptes.
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Le Cours Léopold, lieu de drague historique à Nancy
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Mais contrairement à Metz, Nancy est
déjà une ville étudiante, et la
jeunesse de l'après guerre a envie de s'amuser, de danser, de vivre...
Les brasseries de la place Stanislas sont le salon de la ville et
toutes les générations s'y retrouvent. Les homos s'y retrouvent
également mais au milieu de tout le monde et surtout dans une
discrétion absolue. Il n'est pas question de parler d'homosexuelité,
d'avoir des regards trop insistants ou des gestes d'affection en
public. Les relations se nouent essentiellement dans le circuit privé. |
A
Epinal, préfecture des Vosges, comme dans d'autres villes de Lorraine,
la vie homosexuelle est encore plus discrète qu'à Metz ou Nancy car
tout le monde se connait. Il faut attendre l'obscurité de la nuit pour
voir les vespasiennes du quai des bons enfants s'animer un peu.
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