Lorraine Gay

Histoire de l'homosexualité en Lorraine
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:: LES ANNEES 80

Culture et militantisme

LES ASSOCIATIONS.

- L'association Arcadie Lorraine, implantée à Metz depuis le début des années 70 va arrêter ses activités en 1982, comme partout en France.

- Comme dans de nombreuses capitales régionales, Metz voit se constituer au tout début des années 80 un GLH (Groupe de Libération Homosexuelle), plus politisé qu'Arcadie. Le GLH de Metz a son siège à la Librairie Géronimo, alors située au 31 rue du Pont des Morts. Il se réunit tous les mardis à 20h au LSD, rue du Wad Billy dans le quartier Outre Seille.

- Metz voit apparaître dans les années 80 une antenne locale de l'association nationale "David et Jonathan". Cette association regroupe des homosexuels chrétiens depuis 1972. Metz est, avec Strasbourg et Mulhouse, la seule représentation de ce groupe dans l'Est. Elle dispose d'une adresse postale mais pas de local propre. Sorties, débats, repas conviviaux sont à l'ordre du jour.

- "Gai, Amitié, initiative (GAI Lorraine)", née quelques années auparavant à Nancy, cette association nancéienne décide de créer une antenne en Moselle. L'antenne messine se dissocie peu à peu de Nancy, avec une équipe qui lui est propre. Elle ne dispose pas de local de réunion. Ses réunions se déroulent dans différents cafés de la ville et notamment durant plusieurs années au Coffee-Shop l'Eclipse, 16 rue des Jardins.

- "ELSECLIT" : Groupe lesbien qui se constitue à Metz en 1988, et qui organise des soirées filles dans différents bars ou restaus de la ville. Son existence sera éphémère.

- L'association nationale de lutte contre le Sida, Aides, crée un Comité Aides Lorraine Nord à Metz qui va aussi chapeauter une antenne à Verdun pour la Meuse.




LES EMISSIONS DE RADIO
Rose Bonbon Du coté des médias, le phénomène des radios libres qui fait son apparition en France en 1981 permet à la communauté homosexuelle de faire entendre sa voix. A Metz, les homos disposent d'une libre antenne sur la polémique Radio Graoully.
1981 : Chaque semaine une émission de 3 heures pour les gays, présentée par Daniel, Emmanuel et Marc se fait entendre sur cette antenne : "Bleu Marine et Rose Bonbon" qui deviendra  "Radio Rose - Radio Bleue" en 1982, est diffusée les vendredi et samedi de 0h à 3h. En 1983, l'émission s'appelle "Du bout des Lèvres" (1983 - 1984).  Malheureusement, Radio Graoully n'émettra que durant quelques années et ce ne sont pas sur les radios survivantes de la Mairie, du Républicain Lorrain ou de l'Evêché que les homosexuels risquent de trouver un micro. Après les années 80, il n'y aura plus aucune émission pour les gays à Metz.

LA PRESSE GRATUITE.
- L'association Gay Amitié Initiative éditera un journal trimestriel gratuit envoyé à tous ses adhérents : "le Chardon Rose".

- Autre média, encore peu répandu à cette époque, la presse gratuite.
En septembre 1989, un journal gratuit créé à Strasbourg quelques mois plutôt, "HEP Alsace Lorraine", est distribué dans les lieux gay de Metz et de Nancy. Des articles sont consacrés à la vie gay en Lorraine et notamment des nombreuses agressions dont sont victimes les homos dans notre région sur les lieux de drague. Car malheureusement, la plus grande visibilité de l'homosexualité n'a pas stoppé pour autant la violence des homophobes. Les coups, injures et meurtres sont très répandus, bien que jamais relatés dans la presse officielle régionale.
Hep propose aussi des reportages sur la vie gay locale, des témoignages, des interviews.

La presse gaie en Lorraine dans les années 80

 

LE SIDA EN LORRAINE DANS LES ANNEES 80.
En 1989, 6 ans après son apparition, le Sida fait l'objet d'études statistiques menées par l'association Aides. En Lorraine, 130 cas ont été recensés depuis l'apparition de la maladie. La moitié de ces malades ne survivront pas aux années 80. Au 30 septembre 1989, 42 cas sont recensés en Moselle, 59 en Meurthe-et-Moselle, 10 dans les Vosges et 3 en Meuse. 58 % des malades du Sida en Lorraine sont des homosexuels. La région est moins touchée que les régions du Sud de la France ou de l'Ile-de-France. L'association Aides possède deux antennes en Lorraine : Aides Lorraine Nord à Metz et Aides Lorraine Sud à Nancy. L'association messine propose une permanence téléphonique pour la Moselle, chaque mardi soir de 20h à 22h. Elle organise aussi des réunions d'information. Le 1er décembre 1989, deux points d'information sont installés à la gare de Metz et au Centre Saint Jacques. Des bénévoles y exposent des panneaux pour expliquer les modes de contamination de la maladie et diffusent des projections vidéo. Il est à noter que cette initiative aura le soutien de la mairie de Metz. Malheureusement, le Sida fera encore plus de ravages dans notre région dans les années 90...

:: DECEMBRE 1983 : DISPARITION D'UNE FIGURE DE METZ.
Toutes les villes ont, à chaque génération, un personnage haut en couleur qui affiche aux yeux de tous son homosexualité ou sa follitude. A Metz durant les années 70-80, ce personnage s'appelle Roland Morainville, mais tout le monde l'appelle "La Morainville" et quelques intimes "la Reine" ou "La Maraine". Quand la Morainville promène son exubérance permanentée dans les rues commerçantes de Metz, elle ne passe pas inaperçue. Issu de la bonne bourgeoisie messine, il est toujours habillé d'un costume sur mesure du plus grand chic, cravate et pochette assorties, chevalière en or. Eternellement bronzé, la Morainville, militant involontaire ou conscient de la cause homosexuelle, a le mérite de ne rien cacher de ses tendances et de faire acte de visibilité à une époque où l'homosexuel de province doit vivre caché et réfréner
ses tendances en public. On le croise dans tous les lieux gay de Metz, du Bizzaroïde au Privé, où il offre à boire à une cour de jeunes minets plus intéressés par sa générosité que par sa beauté plastique. On dit aussi que les soirées qu'il organise dans son grand appartement de la rue du Pont Saint Marcel sont particulièrement chaudes et toujours arrosées au champagne. appartement MorainvilleCet appartement bénéficie non seulement d'une vue splendide sur un des bras les plus romantiques de la Moselle à l'arrière du théâtre mais surtout sur la tasse de la Comédie, la plus fréquentée de la ville, au pied du Temple Neuf. Dans le milieu gay messin, la Morainville catalyse à elle seule tous les ragots imaginables mais aussi une forme de respect, car il ose afficher ce que les autres n'ont pas le courage laisser entrevoir. Par une froide soirée du 15 décembre 1983, Roland Morainville a été égorgé dans son appartement par deux jeunes voyous qu'il avait invité pour passer un moment distrayant. Après avoir dérobé son argent et quelques objets de valeur, ils ont mis le feu à l'appartement pour maquiller toutes les traces de leur crime. L'intervention des pompiers dans ce quartier historique n'est pas passée inaperçue et le meurtre de la Morainville non plus. Il est mort comme il a vécu, en militant malgré lui de la cause homosexuelle. La façade noircie de son appartement restera longtemps le témoin du sort que beaucoup d'homosexuels de l'époque subissent, généralement dans l'indifférence générale. L'ile du Saulcy est quotidiennement l'objet d'agressions et fréquemment de meurtres au couteau, sans que la presse locale n'y consacre une ligne. Et Metz est à l'image de toutes les villes de province où l'homosexuel est simplement un objet de chantage, de racket, ou de violence exercée parfois par d'autres homosexuels refoulés qui n'admettent pas que certains aient eu plus de courage qu'eux en assumant leur sexualité. Si, en proportion de la population, Paris est derrière la province en terme de statistiques, parce que l'homosexualité est mieux tolérée, le journal Gai Pied recensera néanmoins pour la seule année 1983, onze meurtres d'homosexuels dans la capitale. 


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